15ème édition (Septembre 2009)

Date Published

Connolly, D. A., Price, H. L. & Gordon, H. M. (2009). Judging the credibility of historic child sexual abuse complainants: How judges describe their decisions. Psychology, Public Policy, and Law, 15(2), 102-123.

La plupart des victimes d'abus sexuels pendant l'enfance ne déclarent pas immédiatement les actes subis et plusieurs ne les dénoncent qu'à l'âge adulte. Engager des poursuites judiciaires dans le cas d'abus sexuels passés commis pendant l'enfance (ASPCPE) représente un processus compliqué. Les difficultés ont notamment trait à l'évaluation de la crédibilité des plaignants. Cette étude porte sur le processus décisionnel judiciaire et a pour but d'étudier la façon dont les juges statuent sur ce type de cas.

Les décisions judiciaires canadiennes concernant les ASPCPE ont été repérées à l'aide de la base de données Quicklaw; l'échantillon définitif comprenait 51 poursuites pénales entreprises minimalement deux ans après la fin des abus et concernait 87 plaignants. La majorité d'entre eux étaient des femmes âgées de 12 ans en moyenne lorsque les abus ont pris fin et de 25 ans au moment du procès. Environ la moitié de ces cas comportait des allégations d'abus répétés (deux occasions ou plus) et le nombre de cas qui se sont soldés par un acquittement était approximativement le même que le nombre de cas qui ont abouti à une condamnation. Les chercheurs ont déterminé 4827 commentaires judiciaires et les ont codés en utilisant une approche par raisonnement inductif (c'est-à-dire une théorie à base empirique) selon quatre grands thèmes liés aux « souvenirs [que le plaignant a] du délit, à la crédibilité du plaignant, à la fiabilité de la preuve et aux inférences judiciaires » (p. 108). Les descriptions que les plaignants ont faites des ASPCPE ne font pas partie de cette recherche.

Les résultats indiquent les facteurs qui influencent le verdict dans les affaires criminelles relatives aux ASPCPE « peuvent être appuyés par des recherches empiriques et être conformes aux décisions des tribunaux supérieurs » (p. 120). Les juges étaient largement plus susceptibles de formuler des commentaires sur les détails précis plutôt que sur les éléments généraux des allégations d'ASPCPE. Ils étaient cependant sensibles aux répercussions du passage du temps sur la mémoire. Les commentaires concernant la fiabilité de la preuve correspondaient à la preuve de nature psychologique : en effet, « il y avait plus de commentaires judiciaires sur les incohérences dans les affaires ayant fait l'objet d'un acquittement que dans les celles ayant conduit à une condamnation et plus de commentaires sur la corroboration en cas d'acquittement qu'en cas de condamnation, bien qu'il n'y ait pas d'association solide entre les incohérences ou les corroborations et le verdict » (p. 105). Les auteurs ont exprimé des préoccupations concernant « l'intérêt judiciaire apparent et considérable pour le comportement et les émotions des plaignants au moment de l'abus allégué et au moment de la divulgation » (p. 105). Ils ont de plus souligné que les commentaires concernant la crédibilité du plaignant étaient au moins deux fois plus fréquents que ceux portant sur la fiabilité de la preuve.


Godbout, N., Sabourin, S., & Lussier, Y. (2009). Child sexual abuse and adult romantic adjustment: comparison of single- and multiple-indicator measures. Journal of Interpersonal Violence, 24(4), 693-705.

La recherche indique que les abus sexuels envers les enfants (ABE) ont des conséquences à long terme qui peuvent avoir des répercussions sur le fonctionnement conjugal. Certaines études ont utilisé des indicateurs multiples « pour obtenir des informations détaillées sur la nature et les corrélats des ABE » alors que d'autres « ont utilisé des indicateurs à facteur unique afin de ... respecter et de protéger les renseignements personnels des participants et leur bien-être » (p. 694). Cette étude compare l'utilité des mesures à indicateur unique et multiple en utilisant un modèle médiationnel bien étayé qui associe l'ABE à la satisfaction conjugale (évaluée à l'aide de mesures de représentation de l'attachement et de la détresse psychologique). Les auteurs ont supposé que l'approche à indicateurs multiples prédirait plus solidement la satisfaction conjugale.

Les 1092 participants canadiens-français qui composaient l'échantillon ont été recrutés grâce à des publicités dans les médias et à des appels téléphoniques effectués au hasard. Il s'agit de 516 hommes et de 574 femmes mariés ou conjoints de fait dont la cohabitation a duré au moins six mois. Chaque participant a rempli le questionnaire indépendamment de son partenaire. Ce questionnaire comprenait 1) un indicateur à facteur unique portant sur la présence ou l'absence d'ABE et 2) un indicateur à facteurs multiples comprenant des éléments « liés au niveau de force, à la relation avec l'agresseur, au nombre d'expériences d'abus et à la nature de l'agression » (p. 695) et 3) des mesures psychologiques de l'attachement, de la détresse psychologique et de l'adaptation dyadique. Sur les 13 % de participants qui ont déclaré être victimes d'ABE, 40 % ont rapporté avoir subi une expérience d'abus et 60 % plus d'une expérience; environ la moitié des agresseurs n'étaient pas des membres de la famille.

Les analyses des modèles à facteur unique et multiples ont été effectuées d'après une modélisation par équation structurelle. Les résultats n'ont pas appuyé l'hypothèse originale; ils ont plutôt démontré que pour les objectifs de la recherche, la simple présence d'ABE fournissait suffisamment d'information pour prédire la relation entre l'ABE et le fonctionnement conjugal grâce aux représentations relatives à l'attachement et à la détresse psychologique. Les auteurs suggèrent que les prochaines recherches examinent séparément les indicateurs d'ABE pour mieux comprendre la corrélation avec le fonctionnement conjugal futur.


Jack, S. & Tonmyr, L. (2008). Knowledge Transfer and Exchange: Disseminating Canadian Child Maltreatment Surveillance Findings to Decision Makers. Child Indicators Research, 1(1), 51-64.

Les organisations de protection de l'enfance s'intéressent de plus en plus à l'élaboration de stratégies relatives à l'utilisation des données probantes de la recherche pour guider la prise de décision clinique, administrative et politique. Afin de renforcer la base de la recherche canadienne sur la protection de l'enfance servant à éclairer les politiques, la pratique et l'élaboration de programmes, l'Agence de la santé publique du Canada a effectué l'Étude canadienne sur l'incidence des signalements de cas de violence et de négligence envers les enfants (ECI), une enquête nationale menée tous les cinq ans pour estimer « l'ampleur et les caractéristiques du phénomène de la violence et de la négligence envers les enfants qui font l'objet des enquêtes des services de protection de l'enfance » (p. 15). À ce jour, les résultats de l'ECI 1998 et 2003 ont été publiés.

En s'inspirant des directives fédérales concernant la priorité accordée au transfert des connaissances et à la prise de décision dans le domaine de la protection de l'enfance, le comité directeur de l'ECI 1998 et 2003 a formé un sous-comité composé d'experts afin d'élaborer une stratégie pour rendre les résultats de l'enquête ECI 2003 accessibles à plusieurs publics y compris le grand public, les professionnels, les décideurs politiques et les chercheurs. Cet article décrit le processus d'élaboration de la stratégie de diffusion et examine la façon dont les messages clefs, les publics cibles, les messagers appropriés et les approches de l'échange de connaissances ont été déterminés. Les auteurs décrivent des leçons clés qui inspireront l'élaboration d'une stratégie de diffusion pour l'ECI 2008, comme le fait de considérer le transfert de connaissances comme une priorité au début de l'étude. De plus, ces chercheurs suggèrent que ces résultats sont pertinents pour d'autres chercheurs qui s'intéressent aux plans de diffusion. Ils expliquent que le processus de diffusion des résultats de l'ECI 2003 est en train d'être évalué et que cette évaluation guidera les stratégies futures de diffusion des connaissances sur la protection de l'enfance au Canada.


MacMillan, H. L., Georgiades, K., Duku, E. K., Shea, A., Steiner, M., et al. (2009). Cortisol response to stress in female youths exposed to childhood maltreatment: Results of the youth mood project. Biological Psychiatry, 66(1), 62-68.

Les chercheurs ont découvert un lien solide entre la maltraitance envers les enfants et les troubles dépressifs majeurs (TDM), surtout chez les femmes, cependant, on ne sait pas très bien pourquoi certains individus exposés à la violence ou à la négligence sont ensuite atteints de TDM et d'autres pas. Les chercheurs ont supposé que « les modifications de la corticolibérine (CRH) médient le développement des TDM » et ont établi un lien entre l'activation accrue de l'axe hypothalamo-hypophysosurrénalien (HPA) et le stress intense plus tôt dans la vie. Cette étude qui fait partie d'une enquête longitudinale de plus grande envergure cherchait à savoir si « les niveaux de cortisol au repos, le rythme cardiaque et les modèles de réaction de stress à un stresseur psychosocial étaient différents » chez les jeunes filles exposées à la maltraitance (définie ainsi : abus physique, sexuel, psychologique et négligence) et chez les membres d'un groupe témoin appariés selon l'âge et le code postal (p. 62).

Les jeunes filles (n=67) âgées de 12 à 16 ans sans antécédent de dépression ni de déficience cognitive ont été recrutées à partir de trois agences de protection de l'enfance. Le groupe témoin comportant des jeunes (n = 25) sans antécédent de maltraitance a été composé à partir d'une base de données préexistante de jeunes désireux de participer à la recherche. Les jeunes ont reçu la visite d'une infirmière en santé publique et ont rempli deux questionnaires autorapportés mesurant la maltraitance envers les enfants. L'infirmière a vérifié leur rythme cardiaque et a prélevé des échantillons de salive. Un clinicien formé a évalué le stress psychiatrique à l'aide du test de stress social de Trier (TSST) et du tableau des troubles affectifs et de la schizophrénie pour les enfants d'âge scolaire. « Le temps pré TSST a été considéré comme étant la mesure du cortisol au repos et la période post TSST a été considérée comme étant la réactivité du cortisol » (p. 63).

Les analyses statistiques complexes « ont porté sur les différences entre les jeunes victimes de maltraitance et ceux du groupe témoin en matière de niveaux de cortisol et de rythme cardiaque au repos et post TSST » (p. 63). Les deux groupes ont manifesté un déclin similaire du niveau de cortisol pendant la période de repos. Les jeunes du groupe témoin ont connu une augmentation du niveau de cortisol après le TSST et un nivellement progressif au fil du temps; les jeunes victimes de maltraitance ont manifesté une réponse brutale du cortisol non associée aux systèmes actuels du TDM. Les chercheurs n'ont pas trouvé de différences entre les niveaux du rythme cardiaque au repos et la réactivité. Les auteurs concluent que les résultats s'ajoutent aux données probantes liant le stress chronique à « la diminution de la réceptivité physiologique aux nouveaux stresseurs au fil du temps » (p. 66). D'autres recherches sont nécessaires pour clarifier la pertinence clinique de ces résultats, cependant, les auteurs suggèrent que la réponse brutale du cortisol peut entraîner des risques de déficience physique et psychologique chez les jeunes victimes de maltraitance.