La maltraitance envers les enfants est un problème important de santé publique. La recherche démontre que les facteurs structurels relatifs au quartier comme la pauvreté et le taux de criminalité peuvent avoir un effet significatif sur le nombre de victimes. La présente étude, basée sur des données sur la ville de Chicago, visait à déterminer les processus sociaux potentiellement modifiables qui pourraient également avoir un effet sur la maltraitance. Les facteurs structurels inclus étaient la pauvreté, les taux d’homicides et de vols ainsi que la variation du nombre d’enfants d’origine hispanique. Les chercheurs ont examiné les processus sociaux suivants : l’efficacité collective (le contrôle social informel et la cohésion sociale), la proximité intergénérationnelle, les réseaux sociaux et les troubles physiques et sociaux. Les résultats mesurés, basés sur des cas de mauvais traitements corroborés d’un organisme de protection de l’enfance de l’Illinois entre 1995 et 2005, étaient les taux de négligence, de violence physique, de violence sexuelle envers les enfants ainsi que les taux de nourrissons exposés à des substances.
Les chercheurs ont trouvé des associations systématiques entre les processus sociaux du quartier et les taux de maltraitance, même lorsqu’ils ont tenu compte des différences relatives aux facteurs structurels. Dans les quartiers où le niveau des processus sociaux était plus élevé, les taux de signalement de maltraitance étaient inférieurs dans toutes les catégories. D’après les auteurs, les stratégies reposant sur les facteurs de protection au niveau du quartier peuvent être plus efficaces pour diminuer la maltraitance envers les enfants que celles qui font uniquement appel aux efforts individuels et axés sur la famille. Ils font valoir que des recherches approfondies sur l’intervention devraient continuer à évaluer les approches qui combinent le renforcement des processus sociaux au niveau du quartier et les améliorations des caractéristiques structurelles.
S’agit d’une étude écologique transversale qui a été reproduite. Les données de l’organisme sur la maltraitance ont été géocodées en fonction des secteurs de recensement, et les proportions relatives au groupe d’âge et au sexe pour chaque catégorie de mauvais traitements ont été calculées pour chaque secteur de recensement aux fins d’analyse statistique. Les chercheurs ont ensuite agrégé les secteurs de recensement en groupes de quartier (EQ); ces EQ (N = 343, regroupant chacun environ 8000 habitants) étaient les cas ou les unités d’analyse. Pour chaque EQ, les valeurs des variables structurelles étaient basées sur les données du recensement des États-Unis et le service de police de Chicago. Les valeurs des processus sociaux étaient fondées sur une enquête communautaire, le Project on Human Development in Chicago Neighborhoods (1995, répété en 2001-2002). Pour cette enquête, des questionnaires standards ont été envoyés à 20 résidents de chaque secteur de recensement faisant partie d’échantillons constitués de façon aléatoire. Les chercheurs ont effectué des analyses statistiques multiniveaux à l’aide du programme MLwiN.
Le devis de recherche et l’analyse statistique utilisés ici étaient élaborés et complexes. Il y avait cependant des limites. Comme le soulignent les auteurs, seuls les cas de maltraitance officiellement signalés et corroborés étaient inclus. Les données sur les débits de boisson – un facteur important dans d’autres études – n’étaient pas accessibles. En outre, les chercheurs ont trouvé des liens significatifs entre un certain nombre de facteurs de risque au niveau de la famille (par exemple, la pauvreté, l’éducation, le chômage, la composition de la famille, la toxicomanie, l’origine ethnique) et la maltraitance envers les enfants. Étant donné le devis de recherche utilisé ici – les cas étant les secteurs de recensement et non les familles – aucun de ces risques ne pouvait être utilisé comme variables de contrôle. Il est intéressant de s’interroger sur l’influence que cette omission a pu avoir sur les résultats.