Revue de Psychoéducation, Volume 36, Issue 2, pp. 329-340
Le Québec, comme plusieurs sociétés occidentales, est préoccupé par le taux de décrochage scolaire de ses adolescents. On connaît maintenant assez bien les facteurs de risque de ce décrochage, qui touchent tantôt le parcours scolaire, le climat scolaire actuel, les difficultés familiales, ou les caractéristiques personnelles des jeunes et de leurs parents. On reconnaît aussi que ce décrochage s'inscrit souvent à la source d'un lent processus de marginalisation sociale. Plus récemment, des chercheurs commencent à s'intéresser au concept plus large de décrochage social chez les jeunes, défini comme un processus de désaffiliation s'aggravant avec l'accumulation des ruptures, non seulement face à l'école mais face aux autres institutions et aux valeurs sociétales en place. Mais peu d'études ont documenté le lien éventuel entre le décrochage scolaire et un décrochage social plus large. Ce lien est possible notamment chez les jeunes présentant des troubles de comportement, qui reflètent déjà souvent une certaine forme de rupture sociale. Cet article présente une étude en cours, à la fois exploratoire, qualitative et prospective, auprès de 30 jeunes de Montréal fréquentant une école spéciale à cause de leurs difficultés de comportement. Cette étude vise à mieux comprendre les trajectoires pouvant conduire certains de ces jeunes vers un décrochage social, alors que d'autres finissent par bien s'insérer socialement. D'autre part, elle vise à cerner le sens particulier du décrochage scolaire chez ceux qui en font l'expérience, et la place qu'il pourrait prendre dans un processus plus large de décrochage social.