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Les répercussions de la maltraitance pendant l’enfance sur les troubles dépressifs et anxieux : Examen des caractéristiques personnelles, des domaines de maltraitance pendant l’enfance et de la rémission

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Résumé

Le but de la présente étude était d’explorer la relation entre la maltraitance pendant l’enfance et les caractéristiques de la personnalité afin de déterminer les chances de rémission des troubles dépressifs et anxieux chez les adultes. Les données sont tirées d’une étude de cohorte longitudinale (Netherlands Study of Depression and Anxiety) composée de 2981 participants âgés de 18 à 65 ans. L’étude comprenait des données relatives à l’évaluation des adultes ayant souffert d’un trouble dépressif ou anxieux au cours des 6 derniers mois (taux de réponse : 49,4 %; n = 1474). Les évaluations de suivi ont été effectuées au début de l’étude, 2 ans et 4 ans plus tard.

Au départ, la présence à vie de troubles dépressifs et anxieux a été diagnostiquée à l’aide du Composite International Diagnostic Interview (CIDI). Les chercheurs ont utilisé le Life Chart Interview (LCI) pour déterminer le temps écoulé jusqu’à la rémission de la dépression et des troubles anxieux. Lors des évaluations de suivi après 2 et 4 ans, ils ont réadministré le CIDI et LCI afin de déterminer si les participants présentaient encore des troubles dépressifs et anxieux. Les chercheurs ont défini la rémission des troubles dépressifs et anxieux comme étant l’absence de symptômes dépressifs ou anxieux pendant 3 mois consécutifs, en se basant sur le LCI. Ils ont demandé aux participants de noter la fréquence de la maltraitance qu’ils avaient subie pendant l’enfance en utilisant une échelle de 5 points (une fois, parfois, régulièrement, souvent et très souvent). Ces fréquences ont été divisées en trois groupes (pas de maltraitance, légère maltraitance et maltraitance grave). En utilisant la somme des résultats de l’échelle de 5 points et les trois groupes de fréquences, les chercheurs ont créé un score cumulatif de maltraitance pendant l’enfance allant de 0 à 8.

Ils ont étudié la relation entre la maltraitance et les caractéristiques démographiques (ex. l’âge, le sexe, le niveau de scolarité, le revenu des ménages et le chômage); les caractéristiques psychosociales (ex. la taille des réseaux sociaux, le partenaire actuel, la présence d’ami(s), la solitude et le nombre d’événements indésirables); les caractéristiques relatives à la personnalité (ex. le névrosisme, l’extraversion, l’ouverture, l’amabilité, le souci du travail bien fait, la dépression, le désespoir, la suicidabilité et locus de contrôle externe). Ils ont trouvé les résultats suivants :

• Il existe un lien significatif entre toutes les caractéristiques socio-économiques et psychosociales (sauf la présence d’amis) et la gravité de la maltraitance pendant l’enfance. Il y a aussi un lien solide entre toutes les caractéristiques de la personnalité et la gravité de la maltraitance pendant l’enfance.
• La négligence émotionnelle et la violence psychologique étaient significativement associées à toutes les caractéristiques socio-économiques et psychosociales, sauf le chômage.
• La négligence émotionnelle était la seule variable explicative significative de la piètre rémission des troubles dépressifs et anxieux après 4 ans.
• Un score cumulatif plus élevé de maltraitance pendant l’enfance était une variable explicative d’une probabilité moindre de rémission des troubles dépressifs et anxieux après 4 ans.
• Les niveaux plus élevés de névrose, de désespoir et de locus de contrôle externe et les niveaux inférieurs d’extraversion étaient de solides médiateurs de l’évolution défavorable des troubles dépressifs et anxieux 4 ans après chez les patients ayant des antécédents de maltraitance pendant l’enfance. Les auteurs ont noté que ces résultats suggèrent de solides effets médiateurs des caractéristiques de la personnalité sur le lien entre la maltraitance pendant l’enfance et les taux de rémission.

Notes méthodologiques

Les chercheurs ont effectué une évaluation rétrospective de la maltraitance pendant l’enfance au début de l’étude. Cependant, l’humeur actuelle des patients ne semblait pas sérieusement affecter les souvenirs de maltraitance pendant l’enfance. Puisque les données ont été recueillies uniquement à partir des évaluations des participants, leur évaluation peut être affectée par leurs propres préjugés et par leur capacité à se souvenir avec précision des événements passés. Les participants souffraient de troubles dépressifs et anxieux au moment de l’étude; leur état peut avoir influencé les mesures de la personnalité. En outre, ces mesures étaient fondées sur des données autodéclarées limitées. Les chercheurs ont utilisé le Leiden Index of Depression Sensitivity Revised (LEIDS-R) pour évaluer le désespoir et la rumination. Il s’agit d’un questionnaire rempli par le patient et comportant 34 items qui mesure la réactivité cognitive due à une humeur maussade. Il a été démontré qu’il permettait d’établir une distinction fiable entre les populations vulnérables à la dépression et les populations saines.